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Une figure lesbienne dans le cinéma français contemporain
L’adaptation du livre autobiographique de Constance Debré par Anna Cazenave Cambet se positionne dans une tendance récente du cinéma français cherchant à offrir une visibilité accrue aux personnages lesbiens. En 2025, plusieurs films majeurs ont mis en scène des héroïnes lesbiennes, créant ainsi un « univers lesbien » comparable à ceux des franchises de super-héros. Des actrices comme Park Ji-Min, aperçue dans Love Me Tender et La Petite Dernière, ou Monia Chokri de Les Preuves d’amour, participent à cet univers interconnecté, incarnant des rôles qui réapparaissent ou s’éloignent d’un film à l’autre, tels les morceaux d’une vie recomposée.
Une protagoniste face à un combat personnel et une critique sociale
Dans Love Me Tender, Vicky Krieps tient le rôle principal, fidèle à ses choix de personnages défiant les normes établies. Elle incarne un personnage inspiré de Constance Debré, femme indépendante et affirmée, dont la vie bascule lorsqu’elle annonce à son ex-mari ses relations avec des femmes. Cette révélation entraîne des représailles judiciaires qui aboutissent à sa perte de la garde de son fils. Antoine Reinartz dépeint brillamment le père, implacable et vindicatif. Le film met en exergue une triste réalité : le système judiciaire, prétendument neutre, peut se transformer en un instrument de contrôle moral, sanctionnant les femmes qui rejettent le modèle maternel traditionnel.
Une mise en scène esthétique qui affaiblit le message
Bien que le film suscite l’empathie, son traitement visuel et narratif semble compromettre la force du sujet. Dans sa quête d’une esthétique sincère — lumière soignée, scènes nocturnes intimes, nudité naturelle, ambiance mélancolique — le film tombe dans un formalisme prévisible. Les éléments de cet « univers lesbien » deviennent presque des clichés : désirs nocturnes, déambulations urbaines, bains communs, attitudes nonchalantes. Cette recherche d’une « émotion juste » conduit à une mise en scène soignée, mais prévisible, qui tend à atténuer la dureté du propos.
Un récit d’émancipation et de rupture sociale
Au-delà de la question de l’identité sexuelle, Love Me Tender explore également le déclassement volontaire. Constance, issue d’un milieu aisé, renonce à sa carrière d’avocate pour mener une vie plus marginale, marquée par la précarité et l’écriture. Cette trahison de classe ajoute de la profondeur au récit, bien que traitée de manière moins percutante que dans À pied d’œuvre de Valérie Donzelli, sorti la même année, qui revisite la figure de l’artiste tourmenté avec plus de nuance.
Conclusion : un film engagé mais piégé par ses propres codes
Love Me Tender exprime une colère légitime contre un système patriarcal et oppressif, tout en célébrant la liberté d’une femme refusant les rôles imposés. Cependant, en s’adaptant aux formes attendues du cinéma d’auteur contemporain, le film bride la portée de son message. Malgré la performance habitée de Vicky Krieps et l’intensité du sujet, l’œuvre oscille entre révolte authentique et esthétisme trop contrôlé, peinant à sortir des conventions du genre qu’elle aspire à bouleverser.
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